Contribution – L’entrée en effraction des sportifs en politique

Si vous êtes avocat, vous êtes professionnellement présidentiable,
Si vous êtes enseignant, vous êtes professionnellement présidentiable,
Si vous êtes ingénieur, vous êtes professionnellement présidentiable,
Si vous êtes économiste, vous êtes professionnellement présidentiable,
Mais si vous êtes sportif, vous devez apporter la preuve que vous êtes présidentiable.
L’élection de George WEAH à la tête du Liberia, ce 28 Décembre 2017 est un évènement politique sans
précèdent. Jamais, dans l’histoire du continent africain, un sportif engagé en politique a réussi à se faire
élire Président de la République avec plus de 60% des suffrages exprimés. Son élection est la
résultante d’une longue bataille de plusieurs décennies en faveur de l’installation de la démocratie en
Afrique.
Cette Afrique-là, est différente de celle des années 60 et 70, fortement marquée par des coups d’Etat et
les régimes militaires. Au Togo, le 13 janvier 1963, Salvanus OLYMPIO est tué dans un coup d’Etat
revendiquée par Gnassimbé EYADEMA, Ghana, Joseph Arthur ANKRAH, remplace par la force
kwame NKRUMAH, (en 1966), au Congo Kinshasa, Joseph Mobutu Sese Seko dépose Joseph Kasa
WUBU et prend le pouvoir (en 1965), au Tchad, Félix MALLOUM supplante de force François
TOMBALBAYE ( en 1975) , au Gabon, Omar BONGO succède par la force au Président Léon MBA
(en 1967), au Mali, Moussa TRAORE chasse Modibo KEITA du pouvoir (en 1968), au Boukina Fasso,
Ababoucar Sangoulé LAMIZANA pousse le Président Felix YAMEOGO à la porte et s’empare du
pouvoir (en 1966).
Ces régimes militaires dictatoriaux ont prospérés dans le continent africain du fait qu’ils détiennent la
force et inspirent la peur. Ceux et celles qui avaient osé s’opposer à leurs desideratas, étaient
embastillés ou tués sans aucune forme de procès. Le discours de la Baule du 20 Juin 1990, de l’ancien
Président français, François Mitterrand lors du 16 ème sommet des Chefs d’Etats et de gouvernements a
marqué un tournant décisif dans les relations entre les pays d’Afrique et la France. Le Togo, le Benin, le
Mali, le Gabon, le Congo, le Zaïre et le Niger organisent entre Février 1990 et Aout 1991 des
conférences nationales. Au Cameroun, en Madagascar, en République Centre africaine, en Mauritanie,
et au Tchad, les forces de l’opposition exige la tenue de conférences nationales.
Toutefois, le processus de démocratisation ainsi enclenché en Afrique n’a pas abouti à l’alternance
politique escomptée à la tête des régimes militaires qui étaient en place. Et pour se maintenir au
pouvoir, la tactique des régimes militaires consistait à changer de statut. Ainsi, ils ont changé
intelligemment de fusil d’épaule en renonçant tout simplement à leur statut militaire pour devenir des
civils. Ils créent des partis et se maintiennent au pouvoir par la force et contre la volonté populaire.
A partir des années 90, une catégorie socio-professionnelle inattendue arrive au pouvoir. L’électricien
et syndicaliste, Lech Valesa est élu Président de la République de Pologne en1990. Plus d’une
décennie plus tard, l’ouvrier métallurgiste, Lula Da Sylva devient Président du Brazil en 2002.
Désormais, la fonction de Président de la république n’est plus une chasse gardée de l’élite

intellectuelle. Au Sénégal, en 2012, on enregistre la candidature de Mme Diouma Dieng DIAKHATE et
celle de Youssou NDOUR injustement rejetée.
L’élection de Lech Valesa en Pologne en 1990 et Lula DA SILVA en 2002 au Brazil à la présidence
respective de leur pays, a changé la perception sociale que l’on avait des conditions d’accès à la
fonction de Président de la république mais aussi et surtout celle que l’on avait de la fonction de
ministre de la république. Au Brazil, en 2003, le Président Lula DA SILVA nomme Gilberto GIL,
musicien, ministre de la culture, au Mali, le Président Amadou Toumani TOURE nomme le 16 octobre
2002, Cheikh Oumar SISSOKO, cinéaste, ministre de la culture, au Sénégal, le Président Macky SALL,
nomme en 2012, Youssou NDOUR, musicien, ministre de la culture et enfin, au Tchad, le Président
Idriss DEBY nomme le 05 Février 2017 Mahamat Saleh HAROUN réalisateur, ministre de la culture et
du développement du tourisme.
L’élection de George WEAH en Décembre 2017 à la tête du Liberia sonne l’avènement d’une nouvelle
ère politique en Afrique. Elle inaugure l’ère de la république des footballeurs qui sont devenus,
désormais, professionnellement présidentiables comme les avocats, les économistes, les enseignants
et les ingénieurs.
L’engagement politique des sportifs est particulièrement timide en Afrique, contrairement en Europe et
au Brazil où des sportifs sont élus députés (exemple : Romario) et où ils sont nommés ministres des
sports (exemple : Pelé) Pourquoi ? Est-ce une question de culture ou une désaffection de la politique?
Cependant, un engagement massif pour le développement du continent africain dans des domaines
divers est noté chez les sportifs africains notamment chez les footballeurs tels que : Samuel ETOO ‘Fils,
Didier DROGBA, Nkwankou KANOU, Jonh UTAKA, Michael ESSIEN, Emmanuel ADEBAYOR, Kolo et
Yaya TOURE, Mohamed ABOUTRIKA et John PAINTSIL et Salif DIAO etc.
Que dire spécifiquement de l’engagement pour le développement social des sportifs sénégalais les plus
riches en faveur de notre pays ? Cheikh SECK, El hadj DIOUF, Habib BEYE, Salif DIAO, Henry
CAMARA, Mamadou NIANG, Ferdinand COLY, Pape Bouba DIOP, Abdoulaye Diagne FAYE,
Diomansy CAMARA sont bien des Sénégalais, même si certains d’entre eux sont binationaux. Ils sont
riches. Mais que font-ils pour aider les populations défavorisées du Sénégal ? Que font-ils pour
l’éducation ? Que font-ils pour la santé ? Que font-ils pour les jeunes sportifs qui rêvent de faire
carrière dans le secteur du foot ball ? Que font-ils pour lutter contre la faim et la pauvreté ?
Salif DIAO et El hadj DIOUF font exception. Ce dernier a annoncé dans les médias, en Décembre
2016, la création d’une fondation d’appui aux initiatives sociales ou de développement avec la
génération de 2002 , au moment où Jonh UTAKA crée sa fondation « UTAKA » pour aider la jeunesse
défavorisée du Nigeria, au moment où les frères Kolo et Yaya TOURE luttent contre la faim et la
pauvreté en Côte d’Ivoire , au moment où Nkwankou KANOU met en place sa fondation la « Kanu
Heart Foundation » au Nigeria, au moment où Joseph Yobo crée « YOBO Charity Foundation » et
donne plus de 300 bourses scolaires et universitaires au Nigeria et au moment où Michael ESSIEN
s’emploie pour soutenir les communautés défavorisées au Ghana.
L’avènement de la république des footballeurs au Liberia pourrait légitimement inspirer des sportifs tels
que : le Camerounais Samuel ETOO Fils, ou l’Ivoirien Didier DROGBA ou le Nigérian Nkwankou
KANOU ou le Sénégalais El Hadj Ousseynou DIOUF. Car désormais George WEAH a montré que c’est
possible d’être footballeur et devenir Président de la République. Mais pourquoi pas eux ? Ils sont
riches et populaires. Engagés dans le développement social de leur pays, ils peuvent être de véritables
adversaires politiques des classes politiques classiques africaines en place.

Relativement à nos richissimes anciens footballeurs (à l’exception de Salif DIAO et d’El Hadj DIOUF
qui peuvent encore mieux faire), il faut noter qu’ils ont un gros handicap à surmonter lorsqu’ils voudront
s’engager en politique : celui de manquer préalablement d’engagement pour le développement social
de notre pays, contrairement à leurs collègues de l’espace CEDEAO qui ont créée des fondations ou
des associations pour aider leurs compatriotes les plus vulnérables et les plus défavorisés.
C’est donc déplorable lorsqu’on entend nos lions du football demander au chef de l’Etat M. Macky SALL
à la télévision, des terrains et des maisons, suite à notre qualification à la coupe du monde en Russie
2018. En effet, nos lions de foot ball (anciens footballeurs ou en exercice) peuvent investir mais aussi
aider les populations sénégalaises les plus défavorisées comme leurs collègues, le Camerounais
Samuel ETOO Fils, l’Ivoirien Didier DROGBA et le Nigérian Nkwankou KANOU, le font dans leur pays
respectif.
Les plus nantis doivent aider les plus pauvres. C’est Dieu qui le dit.
Vive le Sénégal !
Vive la république !

Par Baba Gallé DIALLO
Email : babadediana@gmail.com

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