Le crash du Boeing 737 MAX, une catastrophe au goût de déjà-vu ?

Les circonstances du crash du Boeing 737 Max d’Ethiopian Airlines, qui a coûté la vie à 157 personnes dimanche, rappellent le crash du vol Lion Air d’octobre 2018. À l’époque, la défaillance d’un capteur de l’avion avait été pointée du doigt.

La Chine, l’Indonésie et l’Éthiopie. Les compagnies aériennes de ces trois pays ont décidé, lundi 11 mars, d’immobiliser au sol leurs Boeing 737 Max, au lendemain du crash d’un vol d’Ethiopian Airlines ayant coûté la vie à 157 personnes.

Une mesure de précaution prise alors même que l’enquête sur les causes de l’accident vient à peine de commencer. Elle suggère cependant que ces États n’excluent pas que cette catastrophe aérienne puisse avoir pour origine un défaut inhérent à ce modèle.

Capteur défaillant

C’est, en effet, le deuxième crash en moins de six mois d’un Boeing 737 Max, après celui d’un avion de la compagnie indonésienne Lion Air en octobre 2018. “Nous avons affaire à un tout nouveau modèle d’avion impliqué dans deux crash aériens en un an. Il y a de quoi se poser des questions car ce genre de chose n’est pas censé arriver dans l’industrie aéronautique”, explique Mary Schiavo, une analyste américaine du secteur de l’aviation, interrogée par la chaîne américaine CNN.

En outre, “les similitudes apparentes entre les deux accidents amènent à se demander si la cause du crash n’est pas la même”, souligne Scott Hamilton, directeur de Leeham Company, un cabinet américain de conseil spécialisé dans l’aéronautique, interrogé par le Washington Post. Les deux avions se sont, en effet, écrasés peu après leur décollage, et dans le deux cas, le pilote avait contacté l’aéroport pour obtenir l’autorisation de faire demi-tour car il avait rencontré des problèmes techniques avec l’avion.

Depuis le crash du Boeing 737 Max de Lion Air, les professionnels du secteur de l’aéronautique ont même identifié un suspect : une sonde située à l’avant qui pourrait présenter un défaut technique. Ce dispositif, baptisé AOA (Angle of Attack ou capteur d’incidence), mesure l’inclinaison de l’avion en vol.

Un rapport préliminaire des autorités indonésiennes, publié en novembre 2018, avait indiqué que ce capteur avait pu fournir des données erronées. Un mécanisme automatique se serait alors déclenché pour rectifier la trajectoire. Mais, en se basant sur de fausses données, ce dispositif aurait fait piquer l’avion du nez au lieu de stabiliser sa trajectoire, et le pilote n’a pas réussi à le redresser. Le rapport ne conclut cependant pas que le problème de capteur explique à lui tout seul la catastrophe.

Un avion au cœur de la stratégie de Boeing

Le problème, souligné notamment par des pilotes de la compagnie aérienne American Airlines (qui utilise aussi des Boeing 737 Max), serait que Boeing n’a pas correctement informé le personnel navigant sur l’existence et le fonctionnement d’une nouvelle mouture du système de stabilisation automatique. Conséquence : le pilote du vol de Lion Air n’aurait pas pu réagir de manière adéquate lorsque ce dispositif s’est déclenché après avoir reçu les mauvaises données du capteur AOA. Après ce crash, Boeing a d’ailleurs publié un bulletin spécifique, début novembre 2018, contenant des conseils à suivre en cas de problème similaire.

La décision d’installer un nouveau système d’assistance en vol sur le Boeing 737 Max sans “informer pleinement les pilotes sur les changements résultait en partie d’un souci d’économie”, souligne le New York Times. Ce dispositif a été conçu pour que le nouveau modèle de Boeing se pilote de la même manière que les anciens 737, ce qui rendait inutile d’organiser de coûteuses séances de formation, rappelle le quotidien américain.

Les raisons du crash du Boeing d’Ethiopian Airlines peuvent aussi n’avoir rien à voir avec le problème identifié par le rapport préliminaire des autorités indonésiennes. Des témoins oculaires ont ainsi indiqué à l’AFP avoir vu de la fumée à l’arrière de l’avion juste avant la chute, ce qui n’avait pas été signalé lors de l’accident d’octobre 2018.

Mais si un même défaut technique est à l’origine des deux catastrophes, Boeing risque de se retrouver dans une situation délicate. Le 737 Max est, en effet, “au cœur de la stratégie de Boeing”, rappelle le Washington Post. Il est le modèle “qui s’est le mieux vendu dans l’histoire du constructeur américain, avec 350 avions écoulés depuis sa mise en circulation en 2017”, souligne le New York Times. Pour l’instant, aucune commande de Boeing 737 Max n’a été annulée, mais un spécialiste du secteur de l’aviation interrogé par le Washington Post assure que “les compagnies aériennes du monde entier vont être très intéressées de savoir s’il s’agit d’un problème concernant la conception de l’avion, avec l’entraînement des pilotes, ou un peu des deux”.

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