Jacques-Henri Eyraud doit être un homme heureux. Au lendemain de la victoire de l’OM en demi-finale aller de la Ligue Europa face à Salzbourg (2-0), son club a déjà mis un pied dans une finale qui doit avoir lieu… à Lyon. C’est justement de l’OL qu’a souhaité parler le président marseillais. Dans un entretien accordé à L’Equipe et à La Provence, l’ancien champion de taekwondo fait un constat amer après les décisions de la commission de discipline de la Ligue. Mardi soir, cette dernière s’est réunie après les incidents de la fin de rencontre entre l’OM et l’OL (2-3) et a décidé de suspendre Adil Rami et Anthony Lopes de trois matches fermes de suspension. Marcelo lui s’en est tiré par deux matches avec sursis. Sitôt après ces sanctions, Eyraud s’est fendu d’un tweet. « J’ai compris… », une référence directe à Bernard Tapie, qui avait lâché la même phrase suite à la main de Vata lors de Benfica-OM en 1990.

Dans ces deux entretiens, le président marseillais dénonce la disproportion des sanctions. Rami répondait à une provocation de Marcelo, alors que Lopes a frappé un intendant de l’OM, qui a pris trois jours incapacité temporaire de travail (ITT). « Il (Rami) n’aurait pas dû répondre à la charge dont il a été la victime. Mais ce que nous avons rappelé, c’est que c’est un joueur avec un casier disciplinaire vide, un joueur qui, en dix ans de carrière, n’a récolté que trois cartons rouges directs, et un joueur qui, lors de cette saison, et alors qu’il est l’un des défenseurs les plus utilisés en France et en Europe, n’a été l’objet d’aucune procédure de la part des instances disciplinaires. Il est connu pour son attitude exemplaire. De notre point de vue, il n’aurait donc jamais dû faire l’objet d’une sanction ferme mais, au pire, d’un sursis. Quand on voit que sa sanction est la même que celle infligée à un joueur qui a frappé l’un de nos collaborateurs, on peut se poser beaucoup de questions » lâche le patron de l’OM.

Eyraud dénonce l’attitude d’Aulas

Jacques-Henri Eyraud en veut notamment à Jean-Michel Aulas pour ses provocations répétées avant mais surtout après la rencontre entre les deux équipes. Le patron lyonnais n’a eu cesse de jeter de l’huile sur le feu. « Je ne suis pas du tout surpris par son côté provocateur. Provocation et Jean-Michel Aulas, c’est un pléonasme. J’ai quand même été étonné par l’attitude des Lyonnais. Ils ont semblé extrêmement choqués par le degré de préparation qui était le nôtre, en répétant qu’en trente ans, ils n’avaient jamais vu ça, que c’était un scandale. Cela ouvre un certain nombre d’hypothèses : la première, c’est que l’OL et son président n’ont pas l’habitude d’avoir une opposition digne de ce nom dans la gestion de dossiers contradictoires ou de contentieux entre clubs. Il va falloir qu’ils s’habituent : nous allons adopter dans toutes nos démarches le même souci du détail, le même niveau de préparation et la même volonté de prouver que les causes que nous défendons sont justes. Encore faut-il que le match n’ait pas déjà été joué avant son coup d’envoi ! Je n’ose imaginer que cela ait été le cas. »

En poste depuis un an et demi à la tête de l’OM, Eyraud a pris le temps d’analyser, de prendre du recul, y compris dans la compréhension du système organisationnel du football français. « Aujourd’hui, ce délai d’un an et demi me permet de tirer un nombre de conclusions de ce que j’ai pu entendre, de ce dont j’ai été témoin, et peut-être de changer d’approche. » Voilà qu’il veut maintenant faire bouger les lignes et modifier certaines habitudes qui lui semblent incongrues. Il a notamment la Ligue dans son viseur. « Là, c’est de l’ensemble du football français, de ses bases, de ses fondations dont il s’agit. Je veux croire encore que la LFP et certaines des commissions qui la composent sont indépendantes. Ce que je note en tout cas, c’est que les membres de la commission de discipline se lèvent plus prestement pour saluer le président de Lyon que celui de l’Olympique de Marseille quand il rentre dans la pièce. Le privilège de l’âge, je présume. (…) C’est malsain parce que cela renforce, qu’on le veuille ou non, un sentiment d’impunité dont l’OL doit quelque part aussi être la victime, parce que les gens le voient. (…) Je pense qu’il faut maintenant franchir un cap et réformer de façon profonde un certain nombre de modes de fonctionnement propres à la Ligue de Football Professionnel. C’est nécessaire et ça l’est d’autant plus quand on voit quelles peuvent être les pratiques dans des grands championnats comme l’Angleterre ou l’Allemagne. C’est une exigence absolue. » Qu’on se le dise, Eyraiud ne se laissera plus faire. La guerre avec Aulas prend un nouveau virage.