REVUE DE PRESSE AFRIQUE A la Une: Algérie, Soudan, l’armée conspuée par le peuple

Au Soudan, après l’éviction du président El Béchir, l’armée poursuit son opération séduction envers l’opinion nationale et internationale en multipliant les annonces apaisantes : promesse d’une transition démocratique et limogeages de certains chefs militaires.

Pourtant, pour le site Sudan Tribune, c’est clair : « le renversement du président Béchir est dû à un soulèvement populaire et non un à coup d’État ou à une prise de contrôle militaire. […] Le fait que les Soudanais aient organisé des manifestations malgré les risques était un signe de leur détermination à changer le style de gouvernance à Khartoum. Il est donc hautement souhaitable, estime Sudan Tribune, que le conseil militaire accepte un processus politique inclusif associant les forces politiques soudanaises aux mouvements d’opposition internes et armés […]. Les associations professionnelles et les organisations de la société civile doivent également participer à ce processus politique afin qu’un gouvernement de transition inclusif soit formé avec un tableau de marche clair vers une transition démocratique. »

Le printemps soudanais

Interrogé par Le Monde Afrique, le chercheur Jean-Nicolas Bach, coordinateur du CEDEJ et de l’Observatoire de l’Afrique de l’Est, à Khartoum, estime que les militaires vont finir par lâcher le pouvoir : « le Conseil militaire n’est pas légitime aux yeux de ceux qui ont risqué leur vie depuis des semaines, explique Jean-Nicolas Bach. Sa durée de vie même paraît extrêmement limitée […]. Le Soudan tient son printemps. Mais, s’interroge-t-il, des facteurs inquiétants demeurent : quelle place pourra occuper le NISS (les services secrets) ? Comment éviter les purges à l’échelle du pays ? Comment concilier militaires de hauts rangs et civils au sein d’une transition dont les contours se font attendre ? »

« Et maintenant ?, s’interroge en écho Wakat Séra au Burkina. C’est la question qui est sur toutes les lèvres au Soudan, après la chute historique d’Omar el-Béchir qui a tenu, pendant plus de trente ans, le pays d’une main de fer. […] Le déficit de confiance entre l’armée et le peuple devient si abyssal que les décisions de la junte militaire au pouvoir pourraient bien rencontrer un mur de protestation infranchissable. »

Le pouvoir kaki en question

En fait, au Soudan comme en Algérie, pointe le quotidien Aujourd’hui, toujours à Ouagadougou, « les civils ne veulent pas de la transition des prétoriens. […° Dans ces deux pays, se joue l’avenir du pouvoir kaki, qui depuis les après-indépendances, sont entrés par effraction dans l’arène politique, et ne veulent plus en sortir. […] Et si en Algérie ou au Soudan, in fine, ce sont les 2 généraux qui arbitreront ces transitions, il est peu probable, estime Aujourd’hui, qu’ils gardent le pouvoir, comme en Egypte avec le général Al Sissi. Les temps changent, l’Afrique se démocratise. » Et le quotidien ouagalais de s’exclamer : « transitaires Oui ! Titulaires Non ! Par la volonté des peuples soudanais et algérien. »

La mobilisation populaire va-t-elle finir par payer ?

Pour TSA en Algérie, le peuple finira par avoir raison des militaires et des caciques de l’ancien régime, toujours en poste : « le mouvement populaire a pris une telle ampleur qu’il relèverait d’une candeur infantile que de penser pouvoir le mater en faisant appel à la machine répressive du pouvoir. »

Le quotidien Liberté est sur la même ligne : « le mouvement populaire a, certes, réussi à ébranler les fondements mêmes du système, le poussant dans ses retranchements, mais il lui reste à réaliser le plus important, à savoir faire partir les figures honnies du régime pour jeter les bases d’une transition politique pour la reconstruction du pays. La tâche ne s’annonce pas de tout repos face à un système politique qui n’hésitera pas à user, comme à son habitude, de la répression pour tenter de s’éterniser… mais pourra-t-il indéfiniment bloquer la marche de l’Histoire ? Il va sans dire que la mobilisation citoyenne va finir par payer. »

Enfin,El Watan enfonce le clou : « quel que soit le degré de la répression, le peuple ne reculera devant aucun sacrifice pour recouvrer sa liberté. “Ils ne peuvent pas nous tuer, nous sommes déjà morts !” Ces terribles propos lus sur la pancarte d’un manifestant résument l’état d’esprit des femmes et des hommes de ce pays. »

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