REVUE DE PRESSE FRANÇAISE A la Une: changement de cap en Algérie

Le président Bouteflika renonce à un cinquième mandat, il promet des réformes, mais en attendant, lui et son entourage restent à la barre… La presse française est partagée ce matin entre espoir et interrogations. Espoir, certes, car « dix ans après avoir manqué le train démocratique du printemps arabe, le pays se voit offrir une occasion historique de basculer dans la modernité », estime L’Est républicain.

« Abdelaziz Bouteflika promet une nouvelle révolution algérienne, s’exclame Libération : pas de cinquième mandat, une conférence nationale pour réformer les institutions, une nouvelle Constitution largement débattue et une élection présidentielle dont il promet qu’elle sera organisée selon les critères internationaux de sincérité démocratique. S’il tient parole, c’est un autre printemps arabe qui se déroulera, dans le plus grand pays du Maghreb, plein d’espoir et d’énergie. »

Un leurre ?

Mais attention, prévient L’Alsace : « Les Algériens qui ont manifesté contre la candidature de leur président malade à un cinquième mandat auraient tort de se réjouir trop vite. Derrière les belles promesses d’un pouvoir à la dérive, le renouveau démocratique qu’ils appellent de leurs vœux est encore loin. Le clan Bouteflika a réussi à gagner du temps. Probablement est-il encore loin d’avoir abdiqué. »

En effet, s’interroge Le Figaro, « ce feu d’artifice d’annonces démocratiques suffira-t-il à apaiser la crise ? Ne sera-t-il qu’un leurre scintillant dans le ciel d’Alger, vite noyé dans le brouillard politicien ? On ne peut que se réjouir que soit ici tracée la voie d’une transition pacifique. Mais chez les manifestants, la vigilance restera sans nul doute de mise. Pour éviter que des combines constitutionnelles ne laissent aux grands barons du régime les leviers du pouvoir. »

La République des Pyrénées prévient également : « Ce sont les mêmes hommes qui entourent Bouteflika qui vont organiser sinon contrôler une conférence nationale à l’issue incertaine tant l’opposition est aujourd’hui dans un état de division extrême, quand certains de ses dirigeants n’ont pas été au fil des années phagocytés par le “système” décrié par les manifestants. Mais, s’interroge le quotidien béarnais, le pouvoir peut-il organiser cette “conférence” sans la participation de représentants du mouvement de masse qui a pris forme depuis trois semaines ? On imagine mal ceux qui se sont soulevés contre le “système” se laisser maintenant confisquer la parole. »

Vers une IIe République ?

Alors, « et maintenant quels scénarios ? », s’interroge Le Parisien. « Plusieurs sont possibles. Selon un connaisseur du “système”, Bouteflika prolongerait en fait son quatrième mandat, en voulant “gérer” lui-même “la période de transition”. Il pourrait nommer le diplomate Lakhdar Ibrahimi pour gérer l’organisation d’une “conférence nationale inclusive et indépendante”. A charge pour elle d’adopter “tous types de réformes”. Bouteflika entendrait préparer ainsi “la Deuxième République”, réclamée par une partie de l’opposition, à sa manière. En reportant l’élection présidentielle, sans fixer de date, lui-même ou son “entourage” resterait à la manœuvre jusqu’au bout. Un an ? Deux ans ? Pas d’indication. »

Par ailleurs, « que fera l’opposition ? », s’interroge encore Le Parisien. « Elle aura le choix de marquer sa désapprobation en boycottant la conférence de consensus, ou bien en y introduisant ses propres réformes, poussant le régime vers ses derniers retranchements. (…) La prochaine présidentielle sera l’occasion pour l’opposition de présenter ses candidats face à celui – ou ceux – du pouvoir. »

En tout cas, conclut Le Parisien, « les prochains mois seront déterminants pour une opposition qui a semblé dépassée par le mouvement de contestation populaire. Il lui faudra encore compter avec un pouvoir prêt à changer d’habits, mais pas de peau. »

Enfin, constate La Montagne, « la société algérienne a changé, la jeunesse a donné le tempo au côté de toutes les générations réunies laissant les islamistes sans voix. La suite sera aussi importante que ce qui vient d’arriver. Car finalement, hier soir, la rue a été encouragée à gagner encore davantage. »

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